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Global Columns

Quel est le moteur du soutien inconditionnel à Donald Trump?

Andrea G

Slate / Moisés Naím et traduit par Micha Cziffra

La présidentielle américaine du 3 novembre 2020 a enregistré le plus fort taux de participation depuis 120 ans. Plus de 80 millions d'électeurs ont choisi Joe Biden, tandis que Donald Trump a recueilli 74 millions des suffrages. Dans l'histoire des États-Unis, ce sont les responsables politiques qui ont engrangé le plus grand nombre de voix.

On a d'abord pensé que la pandémie actuelle, associée aux premières allégations du président Trump à propos de fraudes à venir, freinerait les ardeurs des Américains. Il n'en fut rien: 67% de l'électorat se sont rendus dans les bureaux de vote ou ont voté par correspondance.

Autre fait surprenant: 74 millions d'Américains ont voté Trump, soit 10 millions de plus qu'en 2016. Surprenant tant à l'égard de la longue liste de sujets qui les ont laissés indifférents que des préoccupations fondamentales qui les ont poussés à soutenir Trump.

Cela ne les a pas dérangés de voter pour un président qui ment comme il respire et se voit régulièrement dénoncé pour cela. Le mensonge compulsif ne devrait-il pas suffire à faire battre un candidat dans les urnes? Soixante-quatorze millions d'Américains ne sont pas de cet avis. Ces personnes ne croient pas que Trump est un menteur, à moins qu'elles ne s'en moquent ou que leurs objectifs et besoins personnels, ainsi que leurs espérances, comptent davantage à leurs yeux que l'honnêteté du président.

Le vote féminin en dépit du pire sexisme

Le fait que vingt-six femmes aient osé accuser publiquement Donald Trump d'inconduite sexuelle, y compris de viol dans certains cas, ne devrait-il pas suffire à lui faire perdre les voix des femmes? La vidéo intitulée «Access Hollywood» [rendue publique par le Washington Post en 2016, ndlr] ne suffit-elle pas à repousser les électrices qui ont vu et entendu Trump dire ce qui suit à l'animateur Billy Bush: «Quand vous êtes une star, [les femmes] vous laissent faire, vous pouvez faire tout ce que vous voulez, les attraper par la chatte, faire ce que vous voulez»?

Eh bien, non! Environ la moitié des femmes blanches ont voté pour Trump.

Et si ces 74 millions de personnes ne se soucient pas de cette série de plaintes pour harcèlement sexuel dont fait l'objet le président, ne devraient-elles pas quand même se préoccuper de la santé de la planète? Non plus, semble-t-il.

Se soigner et protéger la planète: futile pour les pro-Trump?

Donald Trump n'a eu de cesse de dénoncer la lutte contre le changement climatique, la qualifiant de stratagème de la Chine pour affaiblir l'économie américaine. Les décisions du président Trump ont été aussi dévastatrices pour l'environnement que juteuses pour les entreprises les plus polluantes, ainsi que les lobbyistes qui les représentent. Car Trump a systématiquement nommé à des postes-clés, au sein des organismes de réglementation, des lobbyistes qui défendent précisément les intérêts du secteur dont ils sont pourtant censés réglementer les activités. Cela pose-t-il un problème aux sympathisants de Trump? À l'évidence, non.

La gestion à la fois chaotique et inepte de la pandémie de Covid-19 par l'administration Trump –un fiasco retentissant– attire-t-elle leur attention? Et quid du mépris qu'affiche Donal Trump à l'endroit des experts, des scientifiques et des fonctionnaires spécialisés qui font tourner les complexes rouages du gouvernement? Il semble que non.

Le fait que deux séries de documents d'une certaine importance restent secrètes –les déclarations de revenus du président et sa politique sanitaire– ne gêne pas non plus les 74 millions de trumpistes. Que cache la situation fiscale de Trump pour qu'il se soit tant démené afin de la soustraire au droit de regard du public? Les électeurs ne devraient-ils pas avoir connaissance des obligations financières du président et à l'égard de qui? Si le président se livre à l'évasion fiscale, ne devrait-on pas le savoir?

S'agissant du projet d'assurance maladie de Trump, il n'est toujours pas connu. Le président a indiqué clairement son intention de détricoter l'Obamacare. Il a répété qu'il remplacerait ce système par «quelque chose de bien meilleur». Les collaborateurs du président ont certes présenté une série de documents en forme de pavé déroutant, mais jusqu'ici, on ignore encore les détails de ce «quelque chose de meilleur». Une chose est sûre, abroger l'Obamacare sans le remplacer sera très préjudiciable à beaucoup de monde, y compris bien sûr à des millions d'électeurs de Donald Trump. Alors, soit ces personnes l'ignorent, soit elles pensent que c'est une fake news, soit elles s'en moquent.

Les raisons de l'inaptitude de Donald Trump à diriger son pays quatre ans de plus sont nombreuses. Il s'est refusé à condamner les suprémacistes blancs; il se désintéresse de la lutte contre le racisme institutionnel; ses succès en matière de politique étrangère sont bien maigres; sur des dossiers stratégiques, il a cédé l'influence internationale de l'Amérique à la Chine et à la Russie; il cumule les conflits d'intérêts; il montre des tendances autoritaires et a sapé –d'une multitude de façons et à de nombreux égards– la démocratie américaine. Mais rien de tout cela ne semble compter pour 74 millions d'Américains.

L'insaisissable soutien inconditionnel à Trump

Mais alors, quelles sont leurs véritables préoccupations? Quel est le moteur de leur soutien si inconditionnel à Donald Trump? Leurs motivations sont nombreuses et vont des considérations matérielles («N'augmentez pas mes impôts») aux réactions fort émotionnelles («Trump comprend ce que je ressens»). Du positif («Rendons sa grandeur à l'Amérique») au négatif («Si Biden gagne, les Afro-Américains envahiront les banlieues»). De la défense de certains droits («Celui d'être armé») à la défense de certaines valeurs («Je suis contre l'avortement»). De l'arrêt de l'immigration clandestine («Un grand et magnifique mur») à l'opposition à la mondialisation économique («La Chine et le Mexique nous piquent nos boulots»).

La sociologie des 74 millions personnes dont nous parlons est aussi diversifiée que déconcertante. Donald Trump s'est adjugé d'importants pourcentages de votes chez les Hispaniques, les populations rurales, les hommes blancs n'ayant pas fait d'études supérieures, les groupes évangéliques, les hommes d'affaires, les ouvriers et de nombreux autres groupes. Par ailleurs, la «géographie économique» des pro-Trump est tout aussi frappante. Selon une étude menée par les chercheurs du think tank Brookins Institution, «la base gagnante de Biden dans 477 comtés englobe 70% de l'activité économique de l'Amérique, tandis que la base perdante de Trump dans 2.497 comtés ne représente que 29% de l'économie».

En outre, nous ne savons toujours pas quels sont les véritables facteurs de ce soutien inconditionnel à Donald Trump, ce qui est confirmé par le fait que les instituts de sondage ont été incapables de prévoir le comportement électoral de ces 74 millions de personnes.

Nous avons quatre ans pour découvrir tout cela.